Sacré sacre [Présuppositionalisme 1]

par Juil 15, 2019Apologia Philo2 commentaires

Nous sommes le 2 décembre 1804, dans l’église Notre-Dame de Paris. Une scène extraordinaire se produit : un militaire et homme politique d’origine corse se tient devant le pape Pie VII. Stupeur : il s’empare d’une couronne et la place lui-même sur sa tête.

Que se passe-t-il ici ? Nous avons une affirmation tonitruante qui est faite par ce dénommé Napoléon : « ce n’est pas de la part du Saint-Siège que je détiens mon autorité – il serait donc impropre que je le laisse placer la couronne sur ma tête ».

Voici ce qu’en a dit la Marquise de Rémusat : « La première idée était que le pape placerait cette couronne de ses propres mains ; mais Bonaparte se refusait à l’idée de la tenir de qui que ce fût. On détermina enfin que l’empereur se couronnerait lui-même et que le pape donnerait seulement sa bénédiction. » (Madame de Rémusat, Mémoires, Tome 2)

Inédit ? Certainement. Irrévérencieux ? Le mot est trop faible. Fourvoyé ? Sans doute. Clairvoyant ? Assurément !

Voici ce que Napoléon avait compris : un inférieur ne couronne pas son supérieur. Pourquoi ? Il n’en a pas l’autorité. L’autorisation et la certification viennent d’en haut et non pas d’en bas. « Sauf dans une démocratie », me dira-t-on. Faux ! Le principe d’une démocratie est de dire que celui qui est en haut de la pyramide du pouvoir, c’est le peuple et son vote.

Il en va de même pour ce qui est de la connaissance. Comment sait-on ce qui est vrai ? Vous serez d’accord avec moi que pour bien étayer sa position, je dois citer les sources qui font autorité. Je ne peux pas citer la position philosophique de Jean-Claude Vandamme si je veux être pris au sérieux.

Ce principe (un inférieur ne couronne pas son supérieur) est la fondation de toute vision du monde solide. Ainsi, si quelqu’un veut prouver que Dieu est Dieu, il faudra que ce soit Dieu lui-même.

Beaucoup de personnes me disent : « je ne crois pas en Dieu parce que la science prouve qu’il n’existe pas » (ce qui est d’ailleurs faux, mais laissons ça de côté pour l’heure). Mais si Dieu est Dieu, et que la science fait partie des créatures de Dieu, alors nier l’existence de Dieu au nom de la science serait comme dire, en 1805 : « Napoléon n’est pas mon empereur : c’est Jean-René Tartampion qui me l’a dit ! » Qui s’en fiche de Mr Tartampion ? Il fait lui-même partie des sujets de Napoléon !

Beaucoup d’autres personnes me disent : « je ne crois pas en Dieu parce que je n’ai pas vu de preuves de son existence » (ce qui est tout aussi faux, d’ailleurs, mais passons). Si Dieu est Dieu, et que tu fais partie de ses créatures, alors faire appel à ta propre expérience et à ta propre autorité pour nier l’existence de Dieu est comme dire, en 1806 : « Napoléon n’est pas mon empereur : je ne l’ai jamais vu ! »

Toute vision du monde – même la plus saine ; même la plus raisonnable – demandera que nous posions un axiome, une présupposition.

Ma présupposition, et celle de tout croyant réfléchi et cohérent est la suivante : « Dieu existe et je le sais parce que Dieu lui-même me l’a dit« .

Ca peut paraître fou de prime abord. Mais il s’agit en réalité de la pierre de touche de la discipline théologique et philosophique que l’on appelle le présuppositionalisme. Je vous invite, au cours de cette série d’articles, à explorer cette façon de concevoir le monde, Dieu et tout le reste. Attention : votre vision de l’univers tout entier et l’idée que vous-vous faites de votre place en son sein pourraient être radicalement réorientées par sa lecture, si vous suivez les articles jusqu’au bout.